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Burkina : Du football à l’athlétisme, Jacob Guiguemdé a fait le bond de la résilience

SOUSTITRE

mercredi 10 avril 2024, par Pascal YE

Bien parti pour une carrière footballistique Jacob Guiguemdé verra ce projet tomber à l’eau. Suite à un accident de la circulation routière en 2017, il connaîtra de nombreux problèmes oculaires qui vont altérer sa vision. Le jeune homme adolescent à l’époque malgré les soins, devient malvoyant mais décide de se reconvertir en athlète.

À défaut de courir derrière un ballon rond, Jacob Guiguemdé fait désormais du sprint sur une piste. Trois fois environ dans la semaine, il s’entraîne aux alentours du stade du 4 aout avec son coach pour préparer ses compétitions. Il est para-athlète de la catégorie de course T13, c’est-à-dire qu’il voit au moins à 50m donc il court sans un guide, et se déplace seul. Le sportif fait en plus de la course, du saut en longueur. En dehors du sport, Jacob Guiguemdé est étudiant en première année de communication et journalisme à l’Institut supérieur des technologies de l’information et de la communication (ISTIC). C’est un malheureux accident qui a causé sa malvoyance, chamboulant ainsi ses habitudes et certains pans de sa vie.

« C’est en 2017 quand je faisais la 1ère D au lycée Phillipe Zinda Kaboré de Ouagadougou que j’ai eu un accident. Je venais de l’entraînement puisque j’étais un footballeur et quelqu’un m’a renversé. C’est à partir de là, que j’ai eu des problèmes. Quand je suis allé à l’hôpital on m’a dit que j’avais aussi des gènes de glaucome en moi. Les médecins ont essayé de récupérer mes yeux et pendant la période de l’accident, je ne voyais plus. Mais grâce aux soins avec le temps, je vois un petit peu plus pour au moins me déplacer », relate le sportif de 23 ans.

Jacob Guiguemdé vit avec sa famille. C’est durant sa période d’adaptation à sa nouvelle condition de malvoyant qu’il était dans une famille d’accueil pour être proche de l’Association burkinabè des personnes aveugles et malvoyantes (ABPAM). « Quand j’ai eu le Bac je suis retourné en famille et c’est de là-bas que je me rends à mes cours. J’ai dû apprendre le braille mais malheureusement on m’a dit que je ne pouvais pas continuer la série D puisqu’il n’en existe pas pour les personnes atteintes de handicap visuel ». L’élève de l’époque était obligé de revenir en classe de 2nd série A4 pour continuer l’école. Une situation qui l’attriste pendant un moment car il cumule beaucoup de retard. Malgré tout, étant brillant, il obtient son baccalauréat en classe de 1ère A4.

Une reconversion sportive difficile mais concluante

« Ma reconversion c’était compliquée », lance le jeune homme avec un air peiné. C’est grâce à l’ABPAM qu’il a découvert le sport pour personnes handicapées. Il y voit alors une nouvelle opportunité de continuer le sport autrement. « Je me suis dit que comme je n’arrive plus à jouer au ballon pourquoi ne pas me lancer dans l’athlétisme. Même si je ne vais pas aller loin juste, je vais au moins m’épanouir. Et quand je me suis lancé, depuis 2021, je suis champion chaque fois en vitesse de 100 m et en saut. »

Parallèlement à ses études, Jacob Guiguemdé s’efforce de maintenir son niveau sportif. Il s’arrange pour s’entraîner les soirs quand il n’a pas cours ou il jongle entre les deux activités. L’un de ses défis quotidien reste la mobilité. Le malvoyant emprunte le bus en général pour se déplacer. « Pour me rendre quelque part, il faut que quelqu’un m’y amène. Même avec le bus, il faut d’abord pouvoir arriver à l’arrêt de bus. Le déplacement est la partie que je n’arrive pas à bien gérer. »

Sur le plan national, il est dans le club de l’Union nationale des associations sportives des aveugles et malvoyants (UNASAM). À sa première compétition nationale à Ouagadougou, il a obtenu une médaille de bronze. « À ma deuxième compétition, on m’a placé en 100 m, 1.500 m et en saut en longueur. J’ai toujours été champion. La dernière fois que j’ai été champion c’était à Bobo 2023 où j’ai été champion en catégorie des 100m. Maintenant concernant les médailles internationales, j’ai été médaillé de bronze au Maroc en mars 2023 », indique-t-il avec fierté. Il se prépare actuellement pour les qualifications des jeux de Paris 2024. Mais avant cela, il ira chercher les qualifications au Maroc bientôt comme ses devanciers.

Le para-sport a besoin d’être accompagné

Séraphin Farma travaille avec Jacob Guiguemdé depuis 2020. Selon lui, l’athlète a intégré l’équipe nationale depuis 2020 mais depuis 2018, il a commencé le sport pour personne handicapées. L’entraîneur affirme que l’actuel athlète était bon au football et avait une carrière prometteuse n’eut été son handicap. « Il fait aussi le para-cyclisme mais il est beaucoup plus concentré sur le para-athlétisme. Jacob Guiguemdé fait partie des meilleurs de notre équipe et la preuve en est que l’année passée, il a remporté une médaille de bronze au Maroc. Je crois qu’il aime ce qu’il fait et ça c’est la première des raisons parce qu’il s’y donne » a fait savoir le coach qui est par ailleurs le directeur technique de la fédération nationale de sport pour personnes handicapées.

Régulièrement dans la semaine, il rencontre son poulain pour améliorer ses performances au niveau des courses de vitesse et des sauts en longueur. « A partir du 11 avril si tout va bien, les athlètes seront internés pour préparer le meeting de Marrakech qui aura lieu du 26 au 28 avril 2024. Jacob aura la chance de participer et on ira voir comment il se comporte là-bas et tester sa performance ainsi que celles des autres » informe Séraphin Farma qui accompagne plusieurs autres par-athlètes dans leurs préparations physiques.

Avec plus de 30 ans d’expérience dans le monde du sport et du para-sport, il assure que c’est la patience avec ces personnes qui peut les amener à acquérir beaucoup de connaissances. Aussi, il faut être très regardant sur le plan hygiénique et leur donner aussi les b.a.-ba de la compétition. « Et ensuite la plus grande difficulté tout le monde la connaît c’est la difficulté financière » déplore le coach. Pour lui qui travaille avec les moyens de bord vu que le stade n’est pas fonctionnel, ce n’est pas chose facile. En dehors donc des moyens financiers et de l’absence des infrastructures, il y a en plus la question de la disponibilité. Étant enseignant son programme n’est pas toujours en accord avec celui de Jacob Guiguemdé.

Il sollicite un accompagnement pour ces personnes vivant avec un handicap qui très souvent porte haut les couleurs du drapeau à l’international. « Si nous avions un accompagnement adéquat, je pense qu’on pourra faire des merveilles », a dit Séraphin Farma pour conclure.

« J’encourage les personnes handicapées à semer la résilience en elles »

Le sport pour Jacob Guiguemdé est temporaire. Son objectif est de se spécialiser dans son métier de journaliste. Il souhaite évoluer dans la communication du sport et rester auprès des personnes handicapées pour les soutenir dans le sport. Pour y arriver, il a besoin de soutien pour terminer ses études. Selon lui, pratiquer le para-sport en particulier demande une acceptation de sa condition physique. Il déplore donc que cette discipline soit délaissée malgré tous les efforts fournis par les sportifs. « En août 2023 pendant les jeux de la francophonie, la première médaille d’or que le Burkina a obtenu c’était grâce à Rihanatou Moné qui vit avec un handicap. C’est elle qui a porté haut le drapeau du Burkina à Kinshasa en RDC pour la première fois avant que Hugues Fabrice Zongo et Marthe Koala n’obtiennent leur médaille d’or. Donc cela veut dire que les personnes handicapées ont beaucoup contribué » fait¬-il sortir même s’il reconnaît que le para-sport est coûteux.

Que ce soit ceux qui sont devenus handicapés avec le temps ou les personnes nées avec un handicap, Jacob Guiguemdé les encourage à semer la résilience en eux. Le handicap n’est pas une raison de faire pitié selon lui. « Toute personne porte un handicap même si ce n’est pas physiquement. Il faut consommer son handicap et passer à la résilience puis s’exprimer sur tous les plans. À l’école il ne faut pas se laisser piétiner par d’autres en disant qu’on a un handicap » conseille l’athlète aux personnes vivant avec un handicap.

Farida Thiombiano
Lefaso.net

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