Créée en 2022, l’association « Santé prévention », mobilise des acteurs de divers horizons pour sensibiliser, dépister et prévenir les maladies chroniques comme l’hépatite, l’insuffisance rénale, le diabète et l’hypertension au Burkina Faso. Coordonnée par le Dr Tombanlé Daniel Koussoubé, sa mission est d’informer la population et d’offrir un cadre communautaire de prise en charge, avant que ces maladies ne se compliquent. Entretien.
Lefaso.net : Quels sont les objectifs de l’association Santé prévention ?
Dr Tombanlé Daniel Koussoubé : L’association Santé prévention a deux objectifs si on peut le résumer ainsi. Le premier objectif c’est de conscientiser la population sur l’ampleur que prennent les maladies chroniques au Burkina Faso. Et le deuxième objectif, c’est de créer un cadre communautaire permettant de sensibiliser, de dépister, de prendre en charge ces personnes, avant que les maladies ne s’aggravent.
Pourquoi avez-vous décidé de vous consacrer spécifiquement aux maladies telles que l’hépatite, le diabète, l’hypertension et l’insuffisance rénale ?
Il faut dire que ce sont des maladies toxiques qui font partie des maladies qui endeuillent le plus les Burkinabè. En plus de cela, ce sont des maladies dites chroniques dont la prise en charge est compliquée, longue et dont le coût financier est élevé. Donc, la prévention s’impose si nous voulons que nos populations soient en bonne santé et qu’elles travaillent pour un Burkina meilleur.
Selon votre constat quelle est la maladie que l’on rencontre le plus chez les Burkinabè ?
De notre petite expérience, depuis que l’on a commencé nos activités, chez les Burkinabè on rencontre plusieurs maladies. Mais en tête viennent les hépatites virales. Les hépatites virales sont des maladies qui prennent de l’ampleur. La maladie prend de l’ampleur et généralement quand on fait le dépistage, sur dix personnes, on verra qu’au moins une personne détectée positive n’est pas au courant. L’OMS indique que l’hépatite B est en train de prendre de l’ampleur et que si nous ne prenons pas garde, elle va faire plus de deuils que le paludisme, la tuberculose et le VIH associés, d’ici 2040.
C’est pourquoi le ministère a activé certaines de ses représentations en mettant en place un programme de lutte contre les hépatites virales qui a été adossé au programme du VIH pour faciliter la prise en charge et donner les informations aux populations. Il y a aussi l’activité de différentes associations comme la nôtre. Nous menons des activités en ligne, des activités physiques pour pouvoir informer. Donc cela fait que beaucoup de personnes ne savent pas ce que c’est que la maladie mais elles en ont entendu parler. Elles savent donc qu’il faut se protéger, parce que c’est une maladie qui est grave. Ensuite, il y a l’hypertension artérielle qui attaque aussi les sujets jeunes.
Faites-vous de la prise en charge des malades ou juste de la prévention ?
Il y a plusieurs types de préventions. Il y a la prévention primaire qui consiste à éviter de tomber malade, la prévention secondaire qui consiste à faire de la vaccination pour éviter les maladies qui peuvent l’être, et la prévention tertiaire qui consiste à éviter la complication de certaines maladies. Donc, pour parler de prévention, l’association s’inscrit dans ces trois types dynamométriques de prévention. Ce qui nous amène souvent à prendre en charge avant que la maladie ne se complique. Notre initiative se veut locale, communautaire afin que la population ait à côté d’elle des agents de santé qui puissent les sensibiliser et, en même temps, les prendre en charge pour que leurs maladies ne se compliquent pas.
Quels sont les défis que vous rencontrez lors de vos actions de prévention ?
Les défis, on peut les regrouper en trois types. Le premier défi, c’est la méconnaissance de la population vis-à-vis de ces maladies. Ce sont des maladies qui prennent de l’ampleur, mais beaucoup de personnes malheureusement l’ignorent. Ils ne savent même pas ce qu’il faut faire ou qu’est-ce qu’il ne faut pas faire, qu’est-ce que la maladie… Cela nous pose problème. Cela fait que beaucoup de personnes se laissent aller à la désinformation.
La désinformation, c’est l’ensemble des mauvaises informations qui circulent autour de certaines maladies chroniques, telle que l’hépatite. Pour l’hypertension artérielle, les gens pensent que quand ils sont jeunes, ils ne peuvent pas en souffrir. Ce genre d’idée reçue a pris le dessus dans nos communautés et on peut dire que cela nous complique la tâche. Le dernier problème qu’on rencontre, c’est la réticence. Avec la désinformation, les gens ne sont pas assez informés, assez sensibilisés, alors ils sont réticents ou ils négligent certaines des activités que nous organisons. Donc les défis que nous avons, c’est de trouver des solutions à ces problèmes.
Quel message avez-vous pour les personnes qui pensent que certaines maladies comme le diabète ou l’hypertension artérielle sont liées à la vieillesse ?
Vieillesse ne rime pas forcément avec maladie. Il faut préparer sa vieillesse. Si vous vivez mal en tant que jeune, pendant votre période de vieillesse, vous avez tous les problèmes parce qu’à ce moment, vous serez exposé à toutes sortes de maladies chroniques. Si vous avez été négligent, c’est une continuité. Étant jeune, il faut adopter les mesures nécessaires. Et là quand on sera vieux, on ne fera pas face à ces problèmes. Et deuxièmement, de plus en plus, ce sont les jeunes qui sont atteints par l’hypertension artérielle, les accidents vasculaires cérébraux, les infarctus du myocarde, les maladies coronariennes.
Donc, ce n’est plus une affaire de vieux. C’est pourquoi je leur dirai qu’il faut se faire dépister et suivre de façon continue sa santé. C’est une visite médicale et ça ne coûte rien. Chacun fait réviser sa moto, peut-être une fois dans l’année ou deux fois dans l’année. Pour l’être humain, il faut une visite médicale aussi pour pouvoir se préserver de ces maladies puisqu’en faisant la visite, on peut détecter très tôt ces maladies et avec des conseils, on peut les empêcher d’évoluer.
Est-ce que vous avez un message à l’endroit des personnes qui ne songent pas à prévenir certaines maladies ?
A la jeunesse, c’est d’être active. Généralement être actif nous évite beaucoup de choses. La deuxième chose, c’est d’éviter l’alcool. On a remarqué que l’alcool dans nos communautés, dans notre entourage, est devenu un mal. Même en dehors des weekends, il n’est pas rare de voir des jeunes qui sont attroupés autour d’une table remplie de bières. Malheureusement, ça fait des facteurs de risques cardiovasculaires. La dernière chose que j’aimerais leur dire, c’est de prendre soin d’eux car c’est un acte de citoyenneté, c’est un acte de patriotisme. On doit prendre soin de soi pour pouvoir prendre soin des personnes dont nous sommes responsables et au-delà de cela, pouvoir prendre soin du Burkina Faso.