mardi 6 août 2024, par Jack
Hierbine Aïcha Palé défend les droits de l’enfant et de la femme au Burkina Faso. Son parcours, de l’université au monde de l’entrepreneuriat, en passant par son travail de formatrice en droits humains, témoigne de son dévouement à créer un environnement protecteur et épanouissant pour les enfants et les femmes. Fondatrice du Cabinet Human Rights Consulting, elle partage avec nous son engagement, les défis rencontrés et les espoirs pour l’avenir des droits de l’enfant et de la femme au Burkina Faso.
Lefaso.net : Comment êtes-vous arrivée dans le domaine des droits de l’enfant et de la femme et depuis combien de temps êtes-vous dans ce domaine ?
Hierbine Aïcha Palé : J’ai commencé à m’intéresser au bien-être de l’enfant très jeune. Je dirais que j’ai toujours été dans ce domaine. J’ai commencé à en faire un métier de manière formelle à partir de l’année 2017. Par conséquent, lorsque j’ai eu la chance de commencer mes études en faculté de droit, le premier cours qui m’a captivé a été le cours de droit des personnes et de la famille, communément appelé (DPF). Je me suis sentie dans mon « élément » comme on le dit souvent. J’ai commencé à faire des recherches pour mieux comprendre un certain nombre de choses. Plus je faisais des recherches plus j’étais convaincue de mon choix.
Je travaille pour les droits de l’enfant et de la femme parce que je sens que c’est ce pour quoi je suis sur terre, donner du sourire à ces enfants qui n’en ont plus et/ou qui n’en ont pas. Tous les projets qui me viennent à l’esprit depuis très jeune sont fortement liés à l’enfant. Chaque être humain étant sur la terre pour accomplir un but bien précis, j’ai la forte conviction que mon but est de donner le sourire aux enfants qui en ont besoin.
Pour ce qui est des droits des femmes, je travaille pour leur épanouissement et leur bien-être, par ricochet au travail de protection des enfants. En effet, selon moi on ne peut pas travailler efficacement pour la cause des enfants en écartant les femmes.
Ce sont elles qui donnent la vie, ce sont elles qui restent le plus en présence des enfants, que ce soit à la maison et/ou à l’école. Par conséquent, ce sont elles qui sont supposées, de par cette proximité, transmettre plus de valeurs aux enfants qui sont à coup sûr le présent et l’avenir d’un pays voire d’un continent. Alors, pour avoir des citoyens du monde, il faut un travail préalable et ce travail passe aussi bien par l’accompagnement des enfants que par celui des femmes.
Quelles sont les difficultés que vous rencontrez ?
Comme dans chaque domaine d’activité, il y a toujours des défis à relever. Les deux plus grands défis que je rencontre, c’est d’avoir de bonnes personnes avec qui collaborer. Des personnes qui ont vraiment la passion de ce que je fais. En plus, il y a la question des partenaires techniques et financiers pour la réalisation de certains projets. Ce n’est pas évident de tout faire à fonds propres.
Depuis que vous êtes dans le domaine, avez-vous constaté des changements positifs ?
Il y a des changements certes, même s’il reste beaucoup de choses à accomplir. Sans aucune exagération, les personnes qui sont très proches de moi sont vraiment impactées positivement et lorsque je regarde en arrière, il y a énormément de changements dans leur manière d’accompagner leurs enfants. Pour ce qui est du reste, le changement viendra sans doute après plusieurs activités publiques.
Quels changements ou améliorations aimeriez-vous voir dans les politiques de protection de l’enfance et de la femme ?
Dans les politiques de protection de l’enfant, j’aimerais vraiment voir l’application de la loi 013/2007/AN portant Loi d’orientation de l’éducation au Burkina Faso, notamment son article 4 qui rend l’enseignement de base obligatoire pour tous les enfants de six ans à seize ans. Pour ce qui est de la femme, je serai ravie de voir des textes de lois qui protègent véritablement les femmes sur les lieux de travail contre tout type de harcèlement et de violence. Il y a énormément d’abus que des femmes subissent en silence dans les entreprises. Je parle des choses que j’ai vues. J’ai un projet en la matière et des partenaires techniques et financiers seront les bienvenus pour m’accompagner dans sa réalisation.
Comment voyez-vous l’avenir des droits de l’enfant ? Y a-t-il des tendances ou des évolutions que vous jugez importantes ?
J’aimerais bien que dans des années à venir, la question des droits de l’enfant ne soit pas vue comme une question qui ne concerne que l’Occident par un grand nombre de personnes. Car comme j’aime le dire, l’enfant est un être humain à part entière et ce qui est bien pour la protection des adultes est également bien pour lui. Mais au regard de son innocence, il est d’une grande nécessité de lui accorder des droits spécifiques afin de mieux veiller sur lui dans sa croissance vers l’âge adulte.
Vu votre engagement professionnel, est-ce qu’il y a une influence sur votre vie personnelle ?
Mon engagement professionnel influence véritablement ma vie personnelle, c’est sûr. Je me surprends parfois en train de poursuivre des parents en circulation pour leur prodiguer des conseils instinctivement face à leur attitude vis-à-vis des enfants ou en présence des enfants assis derrière leurs moyens de déplacement.
Vous êtes à la tête du Cabinet Human Rights Consulting, pouvez-vous nous en dire plus ?
Le Cabinet Human Rights Consulting (CHRC) a été créé en 2017. C’est la conviction de la présence d’un besoin qui m’a amené à le créer. Il a pour mission de promouvoir et défendre les droits de l’enfant. Œuvrer au bien-être psychologique des enfants.
La première difficulté à laquelle j’ai été confrontée était la malhonnêteté de certaines personnes que j’ai rencontrées sur le chemin. Elles sont venues en loups déguisés en agneaux afin d’avoir gain de cause. En plus, il y a la difficulté de trouver une personne avec qui travailler en synergie. Une personne qui épousera l’idée maîtresse et qui acceptera de travailler véritablement pour l’accomplissement des projets/initiatives. Pour terminer sur ce point, il n’est pas aisé de trouver des partenaires techniques et financiers pour la mise en œuvre de certaines initiatives.
Quels sont les projets ou initiatives entrepris dont vous êtes particulièrement fière ?
Je suis particulièrement fière de deux principales choses. La première chose concerne la création et l’animation de mon blog, notamment le choix des thématiques que j’aborde. J’ai abordé des thématiques sur le blog et quelques temps après, des décisions ont été prises par les autorités du pays. Je ne saurais dire que ces décisions ont un lien avec le contenu de mes écrits, mais ça fait plaisir de savoir que je suis en avance sur le temps comme aime me le dire un de mes amis.
La seconde chose pour laquelle je suis particulièrement fière est la rédaction et l’édition de mon premier livre à compte d’auteure intitulé « Savoir dire non quand et comme il faut une puissance qui libère ». J’en ai rêvé et je l’ai fait.
Quels conseils donneriez-vous à quelqu’un qui souhaite s’engager dans la défense des droits de l’enfant et quelles sont les compétences essentielles pour réussir dans ce domaine ?
Je ne peux qu’encourager ces personnes qui souhaitent s’engager dans la défense des droits de l’enfant, car il y a beaucoup à faire. Cependant, il faudrait que ces personnes s’arment de beaucoup de courage, car sous nos cieux ce n’est pas très évident. Je les encouragerais également à se former autant que faire se peut en la matière.
La première des choses consiste à se former en matière des droits humains de façon générale. Pour ce qui est des qualités je dirais entre autres aimer ce que l’on fait, car ce n’est pas à chaque fois qu’on sera rémunéré pour ce travail. Ensuite, il faut accepter de désapprendre pour réapprendre car c’est un domaine qui évolue très rapidement. Enfin, il faut être une personne assez ouverte d’esprit et avoir la volonté de ne pas juger rapidement ce qu’on ne connaît pas encore.
Hanifa Koussoubé
Lefaso.net